Le principal dépôt d’hydrocarbures de la Société guinéenne de Pétrole de Kaloum a été touché dans la nuit du dimanche au lundi par un incendie dont l’origine n’a pas encore été attestée. Dans une déclaration publiée dans la foulée de cet événement catastrophique, le gouvernement guinéen a voulu rassurer les citoyens, indiquant notamment qu’une enquête serait bientôt ouverte pour “situer les causes et les responsabilités.”

Il ressort surtout de ce communiqué de la mobilisation spontanée de différents services spéciaux d’urgence pour maîtriser l’incendie et limiter ses dégâts. “En attendant une maîtrise totale de la situation,” a semblé indiqué le communiqué, l’heure n’est n’est ni à la chasse aux sorcières ni aux prophéties de malheur.

Or si le gouvernement s’est voulu préoccupé mais rassurant dans sa communication publique en “ces moments de dure épreuve” où nos compatriotes dans les environs de Kaloum s’inquiètent, s’affolent au regard de l’ampleur de cet incendie gigantesque, certains de nos compatriotes ont choisi de faire dans la division et dans la prophétie de mauvaise augure. 

Et comme pour se moquer de cette souffrance collective et de la gravité du moment – qui devraient pourtant tous nous émouvoir et réveiller en nous cette solidarité nationale -, ils trouvent toujours les raisonnements acrobatiques pour ramener tout à leurs retranchements politico-ethniques. 

Je ne sais pas d’où vient notre propension pour la prophétie du mal et du chaos, comme si dans notre subconscient général, nous devons toujours nous attendre au pire et trouver des moyens si irrationnels de les expliquer. On a connu en Guinée le virus Ebola, la Grippe A/H1N1, la Covid19. Ont-ils étaient annoncés par nos faux prophètes ? 

Sur le cas du dépôt de carburant, il n’échappe à personne, en tout cas pour ceux qui s’informent sur la Guinée, que longtemps il a été question de prendre des mesures idoines pour sa sécurisation et qu’au final il serait judicieux de le délocaliser. 

En son temps, le Ministre Diakaria Koulibaly indiquait un montant de 130 millions de dollars pour la réalisation des travaux de sécurisation et de délocalisation de ce dépôt. Il est vrai que l’emplacement de ce dépôt, en plein centre-ville de la capitale et dans le nez d’une centrale électrique nous laissait tous quelque peu inquiets, d’autant plus que les incidents de 2016 et de 2019 en avaient suffisamment donné l’alerte. 

Comment a-t-on pu laisser prospérer un si grand dépôt de carburant en plein centre ville, dans un pays où la croissance de la population en milieu urbain est galopante ? Du point de vue stratégique, ce dépôt a toujours été un point névralgique de notre capitale. Aujourd’hui, ce sont les pouvoirs publics qu’il faudrait indexer, pour leur négligence ou peut-être pour avoir trop traîné les pas sur cette question aussi cruciale. 

La Société Nationale des Pétroles (SONAP), résultat de la fusion de l’Office National des Pétroles (ONAP) et de la Société Nationale d’Importation des Pétroles (SONIP), devrait être à pied d’œuvre pour concrétiser la délocalisation des dépôts pétroliers. L’urgence est à la construction d’infrastructures de stockage dignes de nom afin de réussir le défi de la délocalisation des dépôts de Conakry et de Kankan. 

L’actuel dépôt de Kankan, tout comme celui de Kaloum est situé en plein cœur de la ville. Il est donc urgent de le délocaliser pour non seulement sauver des vies mais aussi satisfaire le besoin crucial des populations en produits pétroliers. 

Mais il ne faudrait pas aussi perdre de vue tous ces dépôts de carburant à travers le pays dans les environs desquels fleurissent graduellement des maisons d’habitation. Il me revient à l’esprit le cas de N’zérékoré dont le dépôt était jadis un lieu isolé, éloigné de la ville et donc désert.  Mais aujourd’hui, il est difficile d’en dire la même chose. 

Quand on aura donc fini de faire face à cet incendie et ses dégâts, il faudra situer les responsabilités, mais surtout il faudra nécessairement penser à agir en amont pour le reste du pays. Sur cette question, la sécurité des populations doit être une priorité absolue.