Située à l’extrême ouest de l’Afrique, la République de Guinée déploie sa majesté sur une étendue de 245 857 km², délimitée par l’Océan Atlantique à l’ouest, la Guinée-Bissau au nord-ouest, le Sénégal et le Mali au nord, la Côte d’Ivoire à l’est, et le Libéria ainsi que la Sierra Leone au sud. 

En son sein, quatre mondes distincts à travers ses quatre régions naturelles, chacune dévoilant des reliefs, des climats, des faunes et des flores singulièrement différents. La diversité et la complémentarité des régions rappellent chacune une grande région d’Afrique.  Cet écrin naturel d’une rare diversité embrasse la quintessence même de la nature, de la culture et offre divers types de tourisme. 

La Basse Guinée, représentant 18% du territoire, dévoile sa magie le long de ses 300 km de littoral, où se nichent des archipels comme les Îles de Loos. Ces îlots, ourlés de mangroves et de plages de sable fin, offrent un spectacle naturel apaisant et des estuaires majestueux propices à un tourisme balnéaire et culturel.

Le charme du Foutah (22% du territoire), réside dans ses chutes, ses cascades, ses plateaux et ses massifs montagneux, tous magnifiés par un climat doux qui contraste avec le soleil chaleureux de la savane arbustive des cités médiévales et précoloniales de Niani et de Bissandougou, parcourues par le fleuve Niger et ses affluents de la Haute Guinée couvrant 40% du territoire.

La Guinée Forestière (20% du territoire), quant à elle, abrite de denses forêts primaires, refuge des derniers primates, tels que les éléphants de Ziama à Macenta, les chimpanzés de Bossou et les crapauds vivipares des luxuriantes forêts des monts Nimba à Lola, jouant un rôle crucial en tant que berceau de biodiversité et d’habitats naturels préservés. 

La capitale, Conakry, offre un contraste saisissant avec la quiétude de l’arrière-pays. Ville portuaire très dynamique, elle est le cœur économique, administratif et culturel du pays. Sa Grande Mosquée, Fayçal, s’élève avec fierté parmi les plus grandes d’Afrique de l’Ouest. Le Musée national, les ghettos culturels de Coronthie et les marchés locaux, comme Madina, sont des incontournables où prospère un artisanat regorgeant de plus de 90 métiers, offrant des produits variés d’excellente qualité.

Pourtant, malgré cette richesse, le secteur touristique guinéen demeure largement sous-exploité. En 2017, seulement 99 000 touristes ont visité le pays, le plaçant au 160e rang mondial. Cette sous-exploitation est un indicateur clair des opportunités inexploitées dans ce domaine.

Le tourisme, s’il était correctement développé de manière stratégique, pourrait jouer un rôle crucial dans l’économie guinéenne. Actuellement, il ne contribue qu’à hauteur de 2% du PIB, soit une infime fraction du potentiel. En comparaison avec d’autres pays, la Guinée se classe au 183e rang mondial en termes de contribution du tourisme à son PIB.

Essor touristique et défis économiques

Le tourisme en Guinée promet des opportunités économiques considérables, capable de générer des revenus substantiels et d’offrir un potentiel pour le développement régional. Cependant, son plein essor nécessite des investissements conséquents dans les infrastructures et la formation du personnel, notamment pour améliorer les routes, l’accès à l’électricité, et renforcer les services dans les zones touristiques.

Dans cette industrie compétitive, une analyse précise des tendances et des préférences des voyageurs est indispensable. Ainsi, les entreprises touristiques doivent constamment s’adapter pour fournir une expérience de qualité, en rivalisant sur la base de normes élevées de service.

La diversification du secteur touristique en Guinée exige une réflexion sur le choix entre le tourisme haut de gamme à faible densité, et le tourisme à forte densité mais à faible valeur ajoutée. Si la première approche offre des avantages pour les secteurs liés à la faune, notamment en attirant des visiteurs moins sensibles aux fluctuations économiques mondiales, il est crucial de reconnaître que toutes les destinations ne correspondent pas à ce modèle.

La préservation des zones moins fréquentées et le développement d’une stratégie haut de gamme pour la faune, idéalement en Guinée forestière, pourraient approfondir les liens économiques tout en protégeant l’écosystème. Cependant, il est essentiel de segmenter minutieusement le marché, en tenant compte du potentiel économique de chaque atout naturel pour parvenir à un équilibre entre volume, valeur et durabilité.

Le gouvernement guinéen, conscient ou non de ces enjeux, a initié divers projets visant la restauration des sites historiques, la création de stations balnéaires et la réhabilitation d’espaces naturels. Des projets fort bien intéressant mais qui, pour le moins, ne semblent découler d’aucune stratégie claire. Or, des risques persistent, notamment celui du tourisme de masse qui pourrait perturber les régions visitées.

Afin d’assurer un développement touristique durable, une politique cohérente doit être mise en place, intégrant le respect de l’environnement et des cultures locales. Éviter une dépendance excessive au tourisme et équilibrer croissance économique et préservation des traditions locales permettrait à la Guinée de tracer une voie vers un développement harmonieux et durable.

Il est crucial de reconnaître que les revenus du tourisme proviennent d’actifs naturels qui peuvent se dégrader et s’épuiser. Des politiques, des lois et des systèmes appropriés sont nécessaires pour assurer la préservation et la durabilité à long terme des atouts. Pour maximiser les retombées économiques du tourisme, des incitations et des politiques économiques sont nécessaires pour promouvoir les liens avec le reste de l’économie, comme cela a été fait dans des pays ayant des success stories.

Bien que le tourisme soit vanté comme un potentiel moteur économique en Guinée, l’image réelle dépeinte par les chiffres cache une réalité bien plus âpre. 

Dans l’ombre des slogans prometteurs, les bénéfices économiques du tourisme peuvent, à bien des égards, contourner largement les communautés locales, laissant peu de retombées pour les populations les plus défavorisées. Au lieu d’un partage équitable, l’essor touristique pourrait entraîner parfois une exacerbation des inégalités, renforçant le fossé entre les riches et les pauvres.

Le développement touristique, souvent imposé par les gouvernements et les investisseurs étrangers, peut même contribuer à l’appauvrissement relatif des populations locales. Des hausses de prix brutales dans des secteurs tels que la pêche ou l’immobilier, résultant de l’afflux touristique, rendent certains biens inaccessibles aux habitants les plus démunis. Cette inflation entraîne des conséquences visibles dans certaines régions telles que les îles et les grandes villes touristiques, où des produits de base deviennent inaccessibles aux populations les plus défavorisées. 

Par exemple, les pêcheurs de Kassa ou de la presqu’île de Kaloum vendent désormais leur poisson — le konkoye par exemple —  jusqu’à dix fois plus cher qu’auparavant, privant ainsi une partie de la population locale d’un produit alimentaire vital. De plus, l’inflation foncière, due à la spéculation, pourrait générer des conflits d’usage entre les populations locales et les autorités.

Les chiffres sont criants : une grande partie des dépenses touristiques ne profitera pas réellement à l’économie guinéenne — ceci étant le cas dans un pays qui importe quasiment tout. Les flux financiers restent souvent bloqués à des niveaux internationaux, les circuits touristiques étant largement contrôlés par des opérateurs étrangers. Les réelles retombées économiques restent minces pour le pays hôte (20 à 30% des dépenses effectuées par les touristes).

De plus, ces chiffres ne traduisent pas l’ensemble des répercussions du tourisme international. Ils omettent la diffusion des dépenses à l’intérieur du pays, laissant de côté les effets spatiaux et sociaux. Aussi, cette focalisation sur les statistiques de dépenses occulte les réalités humaines : les conditions de vie des communautés locales et la répartition inégale des richesses.

Le tourisme, prétendument catalyseur de croissance, suscite des doutes quant à son véritable impact sur le développement guinéen. La dépendance économique vis-à-vis du tourisme expose le pays aux fluctuations politiques et économiques mondiales, exacerbant sa vulnérabilité aux changements extérieurs.

Ce constat invite à repenser l’orientation économique du pays. Si le tourisme peut apporter des avantages, sa place prépondérante dans le schéma de développement nécessite un réexamen sérieux. La recherche d’une diversification économique plus équilibrée, combinant différents secteurs, apparaît comme une piste à explorer pour une croissance durable et équitable.

Promesse de richesse, le tourisme est ainsi devenu un miroir déformant qui masque la réalité économique de la Guinée. Si les chiffres sont révélateurs, ils ne peuvent à eux seuls saisir les multiples facettes de ce débat complexe. Au-delà des statistiques, une réflexion plus approfondie est nécessaire pour comprendre les réelles retombées du tourisme sur le développement guinéen.